Il n’y avait pas de secrets entre eux. Ils n’ont simplement pas ressenti le besoin de cacher quoi que ce soit.

Il n’y avait pas de secrets entre eux parce qu’il n’y avait pas de peur.

Alors quand la fin approchait, ils ont parlé de tout. Des filles et du deuil, de la maison et de l’argent, de la Rabbin et de l’enterrement et de la Shiva, de la vie après la mort et de la famille et des amis.

Il était important pour lui qu’elle se sente aimée et choyée, mais qu’elle ne soit pas étouffée et qu’ils fassent attention avec elle.

Alors il a écrit une lettre ouverte, et il lui a donné à lire. Il voulait qu’elle sache.

« Je comprends, bien sûr, qu’au moment venu je ne serai pas là et je n’ai aucune intention ni désir de tout planifier ou de tout contrôler.

Cependant, je sais que les émotions entourant la mort et le deuil sont si fortes que les gens peuvent agir de manière inappropriée, ou simplement manquer de délicatesse et risquer d’ignorer les besoins ou la douleur de l’autre.

Alors prenez ce texte pour ce qu’il est : Un appel à l’attention et à la sensibilité.

Je crains que la plus grande difficulté soit la sienne et celle des filles. 

Je demande, du fond de mon cœur, que vous leur accordiez de l’attention et que vous respectiez leurs souhaits. Elles ne savent pas toujours demander, donc une grande sensibilité et une grande attention à leurs besoins sont nécessaires ici.

Les désirs, les besoins et la douleur des autres sont, bien sûr, importants, mais, s’il faut choisir, ils le sont moins.

Je veux que mon entendement, la Sivea, etc., soient tenus près de la maison où j’ai vécu avec elles.

Je serais très heureux et je pense que ça les aiderait beaucoup, si Delphine Horvilleur dirigeait la cérémonie et peut-être même les accompagnait après.

Il a même écrit à Delphine Horvilleur. Il lui a montré le mail et la réponse qu’il avait reçue.

« Là-bas, je serais heureux si vous érigez un « mémorial utile » en ma mémoire.

Par exemple – un peu au-dessus du campement dans le désert, il y a une petite colline où, soudain, la réception du téléphone portable est rétablie.

Si vous y installez un banc ombragé (peut-être un banc parisien ?) afin que ceux qui le souhaitent puissent appeler assis à l’ombre, ce serait vraiment chouette..

En général, essayez, autant que possible, non seulement de pleurer ma mort mais aussi de célébrer ma vie.

J’ai eu une vie merveilleuse. Avec de bons amis proches, une famille chaleureuse et attentionnée, des parents aimants, des frères solidaires et merveilleux, des filles incroyables, les filles que tout le monde rêve d’avoir. Et elle, l’amour de ma vie, qui a donné à tout un goût et un sens.

Et aussi ces dernières années, qui n’ont pas été faciles ni simples, tellement de gens m’ont soutenu et ont été là pour moi. Médecins, psychologue, mes frères, et quelques amis proches et membres de ma famille qui se sont inquiétés pour moi, ont pensé à moi, m’ont écrit et sont venus me rendre visite, ont écouté, souri et tenu dans leurs bras. Et encore elle, et encore les filles. »

Il a aussi pensé à ceux qui se sont présentés comme voulant soutenir mais en fait pensaient surtout à eux-mêmes et à leurs propres besoins. Mais, comme d’habitude, il ne l’a pas écrit parce qu’il n’avait pas osé.

Il n’était pas très courageux.

« Grâce à eux, ma vie a été une bonne vie, et sa fin, bien que un peu prématurée, a été une bonne fin.

Alors je vous laisse les détails. Soyez empathiques et gentils les uns envers les autres. Pensez un peu moins à vous-mêmes et un peu plus aux autres.

J’ai été bien. »

Quand elle eut fini de lire, elle pleura. Et elle l’embrassa.

Il n’y avait pas de secrets entre eux.

Il n’y avait pas de secrets entre eux parce qu’il n’y avait pas de peur.

Et il n’y avait pas de peur parce qu’il y avait de l’amour.